Adolescents de l’illimite · Journée du laboratoire du CIEN de Fribourg

Pour beaucoup d’adultes, l’adolescence implique dans sa définition même l’idée de difficulté, ce qui est à démontrer. La complaisance d’une certaine psychologie ordinaire guette d’un œil compatissant cette période de « l’éveil des hormones » qu’on ne pourrait pas soi-disant traverser sans fracas ni dégâts.

Il reste qu’au-delà du discours courant, l’adolescence, « la plus délicate des transitions », est une période qui peut connaître des turbulences très diverses, qui vont de ce qu’une époque pas si loin-taine appelait « l’âge bête » à une sorte de terrain vague, de no man’s land où l’angoisse voisine avec un danger extrême. L’adolescence se présente là comme une question, plus, une demande posée aux adultes, qui quoiqu’ils soient « déjà passés par là », peinent parfois à lui donner une réponse à la hauteur de son urgence.

Quelle structure, quels lieux dès lors mettre en place pour accueillir et aider ces jeunes dont l’existence à la dérive inquiète : fugues à répétition, conduites à risque, éclats de violence et de révolte contre un autre méchant, prostitution, souffrance d’un mal souvent incernable donc indi-cible, automutilations, tentatives de suicide.

Mais quel trop-plein agite ces « adolescents de l’illimité », ou quel vide ? Qu’est-ce qui fait l’instabilité de leur place parmi les autres, en quoi leur être manque-t-il parfois si cruellement de contours ou de consistance ?

Comment, côté intervenants, ne pas se laisser emporter par l’angoisse que peut communiquer la détresse à la limite du supportable de certains sujets, ni céder aux gestes de maîtrise – sans parler du risque de (ré)pressions de toutes sortes – qui aggravent le malêtre au lieu de l’alléger : règles de vie en institution trop rigides, attention trop marquée, conseils bienveillants mais hors de saison, degré de proximité mal calculé. Comment régler le désir d’aider sans le standardiser ?

Ce que l’expérience a appris à celles et ceux qui sont engagés dans le tourbillon de l’imprévu, c’est la nécessité, pour être à même de répondre à ces jeunes parfois sans âge, de travailler à plusieurs : édu-catrice spécialisée, juge des mineurs, enseignant, assistant social, psychanalyste, concierge, …, ce qui permet à chacune et à chacun d’être décomplété face aux jeunes qui les rencontrent, et de s’appuyer sur les autres intervenants pour consolider son intervention. Cette pluralité permet de rendre palpable aux adolescents en désarroi qu’il y a quelqu’un pour qui ils comptent – chose qui pour nombre d’entre eux est très loin d’être évidente -, mais qu’ils ne dépendent pas d’une seule ou d’un seul, ce qui pour plusieurs d’entre eux les ramènerait à une expérience douloureuse du lien à l’autre.

Il n’est donc pas inutile de clarifier ce qu’aider veut dire ; de tâcher aussi de définir de quelle sorte de savoir on peut disposer pour aider les adolescents de l’illimité. C’est ce à quoi, depuis les débuts du CIEN, s’attellent les intervenants de tous bords qui s’éclairent de l’orientation lacanienne : pas de solution toute faite, pas de savoir définitif : nul protocole assuré qui garantisse que le passage de l’adolescence se fera sans heurt; pas de par avance, pas de paravent.

Inscription souhaitée : – contribution 30.- CHF
Visite de l’exposition de Viviane Fontaine au MAHF en fin de journée.