Brunch Clinique : « Le Rien : entre désir et jouissance »

Date : Samedi 08 octobre, 2022 – 10h00 à 14h40

Lieu : Hôtel Mirabeau, Lausanne

Inscription :   Participation aux frais : 30 CHF

Avec la participation de Jocelyne Huguet-Manoukian

Psychanalyste à Lyon, membre de l’EFC et de l’AMP, enseignante à la Section Clinique de Lyon, chargée d’enseignement à l’université Lumière Lyon II.

Programme : « Le Rien : entre désir et jouissance »

09:30-10:00 : Accueil

10:00-10:10 : Mot d’ouverture Dominique Rudaz

10:10-11:10 : Présentation clinique Aikaterini Nteli. Discutant : Leslie Ponce

11:10-12:10 : Présentation clinique Boutheina Ghajati. Discutant : Carlo Delli Noci

12:10-13:10 : Pause Brunch

13:10-14:10 : Présentation clinique Frédéric Pacaud. Discutant : Lise Schild-Paccaud

14:10-14:40 : Conclusion Jocelyne Huguet-Manoukian

Argument

Dans l’enseignement de Lacan on peut envisager sous deux versants différents le rien : celui dialectique, où le rien est fondamentalement la vérité du désir, et le versant plus inerte d’une jouissance pulsionnelle acéphale, autodestructrice.

Nous retrouvons dans le Séminaire IV1plusieurs passages où Lacan élabore le rien dans les retournements rocambolesques de la dialectique mouvementée du désir, dignes d’une Phénoménologie de l’Esprit. Le rien s’inscrit ici dans les rapports du sujet avec l’Autre, entre besoin, demande, désir et amour. Par exemple, dans l’anorexie de l’enfant, le refus de tout objet du besoin (voire nourriture) venant de l’Autre (maternel), vise à ce rien… qui n’est pas rien : non pas « ne rien manger », mais « manger rien »2, dans cette « absence savourée comme telle »3! Et en même temps, ce refus met l’enfant d’une position de dépendance vis-à-vis d’un Autre qui, dans certains cas, « confond ses soins avec le don de son amour »4, à une position de toute-puissance : « C’est au niveau de l’objet annulé en tant que symbolique que l‘enfant met en échec sa dépendance, et précisément en se nourrissant de rien. C’est là qu’il renverse la relation de dépendance, se faisant, par ce moyen, maître de la toute-puissance avide de le faire vivre, lui qui dépend d’elle. Dès lors, c’est elle qui dépend par son désir, c’est elle qui est à sa merci, à la merci des manifestations de son caprice, à la merci de sa toute-puissance à lui »5.

Si dans ce versant le rien vient nourrir le désir en l’écartant du besoin, dans le Séminaire XI6c’est la jouissance mortifère qui vient au premier plan… et là ça devient moins drôle. Refus de nourriture, mais aussi mutisme, voire ascétisme extrême, où il y a une sorte de satisfaction pulsionnelle acéphale dans le rien positivé comme objet. Pensons à l’image freudienne de la bouche qui se baiserait elle-même : bouche cousue, fermée à l’Autre. Notamment, dans l’analyse, « nous voyons […] pointer au maximum, dans certains silences, l’instance pure de la pulsion orale, se refermant sur sa satisfaction »7. Cet objet rien vient parasiter le corps, ce corps qui est poussé vers sa propre destruction : pur anéantissement de soi. Le sujet peut venir à incarner cet objet condensateur de jouissance, la parole est désactivée, il peut aller jusqu’à se laisser mourir, à se faire le déchet. Si le rien dans le Séminaire IV venait alimenter le désir, ici il le désubjective sous la forme d’une jouissance totalisante qui ne laisse plus place à rien d’autre : rien.

Comment ces deux versants du rien se manifestent-ils dans la clinique contemporaine ? Comment peut opérer l’analyste au cas par cas, que ça soit dans la clinique structurale de la névrose, et particulièrement du désir hystérique, ou dans celle moins dialectique, plus inerte de la psychose ? En quoi la pratique analytique ouvre le rien à une dimension subjective ?

Toutes ces questions seront mises en discussion lors des présentations cliniques du 8 octobre.

Pour le bureau de l’ASREEP de la NLS,

Dominique Rudaz

Notes : 

  1. Lacan, Le Séminaire, livre IV, La relation d’objet, 1956-1957. Paris, Seuil, 2001.
  2. Ibid., p. 184.
  3. Ibid., p. 185.
  4. Lacan, « La direction de la cure », 1958, in Ecrits. Paris, Seuil, 1966, p. 628.
  5. Lacan, Le Séminaire, livre IV, La relation d’objet, 1956-1957. Op. cit., p. 187.
  6. Lacan, Le Séminaire, livre XI, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, 1963-1964. Paris, Seuil, 1973.
  7. Ibid., p. 164.