Séminaire d’introduction à la psychanalyse d’orientation lacanienne · 2024 – 2025

 

Séminaire d’introduction à la psychanalyse d’orientation lacanienne, 2024 – 2025

« La clinique des psychoses »

 

Programme 2024-2025

  • 1er octobre 2024 : Introduction à la question des psychoses
  • 5 novembre 2024 : La signification du délire
  • 3 décembre 2024 : L’Autre et la psychose
  • 14 janvier 2025 : De ce qui revient dans le réel
  • 4 février 2025 : Le phénomène psychotique et son mécanisme
  • 4 mars 2025 : Du rejet d’un signifiant primordial
  • 8 avril 2025: L’entrée dans la psychose
  • 6 mai 2025: Le transfert dans la psychose
  • Juin 2025 Journée de clôture

Argument

Pour cette 4ème année du Séminaire d’introduction à la psychanalyse d’orientation lacanienne, nous avons choisi de parler de la clinique des psychoses.

Les psychoses sont bien connues de la psychiatrie classique, qu’il faut bien distinguer de la psychiatrie actuelle, qui réduit l’abord des psychoses en le soumettant de plus en plus aux avancées des neurosciences au niveau du cerveau. De même, dans les consultations ambulatoires, les programmes types sont très répandus, et la structure psychotique n’est pas moins oubliée dans les classifications internationales actuelles.

Dans les premiers temps de la psychanalyse, Freud commence par s’intéresser à la folie des hystériques et à leur rapport à l’inconscient. Pour ce qui concerne les psychoses, Freud indique en 19221 que les troubles narcissiques (démence précoce, paranoïa, mélancolie) sont difficilement accessibles à la thérapie analytique. Il ajoute cependant que cette « insuffisance thérapeutique » n’empêche pas l’analyse de faire des pas vers une compréhension plus profonde de ces maladies. Freud approchera les psychoses dans leur différence étiologique et structurelle d’avec la névrose.

Tôt dans son enseignement, Lacan donne une place centrale à la clinique des psychoses en lui consacrant un séminaire entier2. Si Freud, pour serrer ce qui fait la spécificité de la psychose, emploie le terme de rejet (Verwerfung), Lacan lui préfère le terme de forclusion. De quoi est faite cette forclusion ? Lacan le précise dans son fameux texte intitulé “D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose” : « C’est le défaut du Nom-du-Père à cette place qui, par le trou qu’il ouvre dans le signifié, amorce la cascade des remaniements du signifiant d’où procède le désastre croissant de l’imaginaire, jusqu’à ce que le niveau soit atteint où signifiant et signifié se stabilisent dans la métaphore délirante. »3

Il est donc question dans la psychose de cette fameuse métaphore paternelle qui fait défaut et rend nécessaire l’usage du délire et des hallucinations, usage qui, comme le précise Lacan, est une tentative de guérison. Il reprend là ce que Freud lui-même affirme dans sa célèbre étude princeps à propos du Président Schreber, où il affirme d’une façon étonnante que loin d’être un effondrement, la paranoïa de Schreber est un recours contre la déperdition psychotique : « Ce que nous tenons pour la production de maladies, la formation délirante, est en réalité tentative de guérison, reconstruction. »4 Cette affirmation ouvre un point de vue décisif qui nous dit qu’il faut absolument aller à contre contre-courant de la conception du délire comme une pure et simple déficience, avec les conséquences regrettables d’une telle perception pour tout traitement possible. L’usage excessif – et parfois presque exclusif – du médicament comme “traitement” est une des issues désastreuses induites par la disparition de toute conception de l’inconscient5.

C’est pourquoi, dans la foulée de Freud et Lacan, ce n’est pas par un “déficit” que Jean-Claude Maleval caractérise la psychose : « La forclusion du Nom-du-Père est un concept dynamique, qui met l’accent sur les ressources créatrices du psychotique, et qui ouvre des possibilités nouvelles pour le traitement en dégageant les capacités de ces sujets à élaborer des suppléances. »6

Au fur et à mesure de l’avancée de l’enseignement lacanien, la structure psychotique a évolué avec de nouveaux concepts tels que le réel, la jouissance et d’autres.

Comme à notre habitude, nous partirons de ce que Freud expose des psychoses pour l’enrichir de l’apport lacanien. Ainsi, le séminaire III sur Les psychoses7, le texte des Écrits qui a pour titre D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose8, ainsi que le cas du président Schreber9, l’étude princeps de Freud sur la psychose, nous serviront de boussole pour le travail de cette année.

Il sera plutôt question de repérer les éléments qui nous font dire que le sujet est dans le registre de la psychose en étudiant les phénomènes élémentaires, la place de l’Autre dans la psychose et le moment de l’entrée dans la psychose, ainsi que de nous interroger sur la signification du délire et le rejet d’un signifiant primordial. Nous serons donc tournés toute cette année sur la clinique des psychoses.

Comme c’est la coutume dans ce séminaire, les participant.e.s seront cordialement invité.e.s s’ils le souhaitent à proposer à la discussion un cas de psychose actuelle qui nous permettra d’aborder dans le cadre de la pratique ces vastes catégories que sont la schizophrénie, la paranoïa ou encore la mélancolie, et qui nous mettra à même d’aborder d’une façon vivante la clinique différentielle des psychoses.

 

Notes :

  1. Freud, Deux textes pour l’encyclopédie La psychanalyse : “Psychanalyse” et “Théorie de la libido” (1923 [été 1922]), Œuvres complètes XVI, PUF, Paris 1910.
  2. Lacan, Les psychoses, Le séminaire, livre III (1955-1956), Seuil, Paris 1981.
  3. Lacan, « D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose » (1955-1956 [déc. 1957 – janv. 1958]), Écrits, Seuil, Paris 1966, p. 577.
  4. Freud, Remarques psychanalytiques sur un cas de paranoïa (Dementia paranoides) décrit sous forme autobiographique (Le président Schreber), Œuvres complètes X, PUF, Paris 1993, p. 308.
  5. V. Là-dessus L’inconscient et le cerveau : rien en commun, Mental n° 40, Eurofédération de psychanalyse, Paris 2019.
  6. Jean-Claude Maleval, La forclusion du Nom-du-Père, Seuil, Paris 2000, p. 23.
  7. Op. cit.
  8. Op. cit.
  9. Freud, Remarques psychanalytiques sur un cas de paranoïa (dementia paranoides) décrit sous forme autobiographique (Le président Schreber), Œuvres complètes X, PUF, Paris 1993.